La téléconsultation : gadget pour urbains connectés ou véritable outil digital idéal pour les déserts médicaux ?

Depuis septembre 2018, la téléconsultation est remboursée par l’Assurance Maladie. Mais comme le révèlent les résultats de la dernière édition du Baromètre B3TSI x Chronic Panel x Egora, les chiffres frémissent à peine. Alors pourquoi si peu d’intérêt quand on sait que la téléconsultation peut permettre de faciliter les prises en charge des patients ? Et d’ailleurs, qui sont-ils ? La téléconsultation est-elle un remède aux déserts médicaux ? Éléments de réponse dans cet article.

L’enquête a été menée en juin 2019 auprès d’un échantillon représentatif de la population française composé de 1005 hommes et femmes âgés de 18 à 75 ans, répartis en termes de régions d’habitation et de taille d’agglomérations. Ce sont donc les voix des urbains et des ruraux qui ont pu être récoltées dans ce baromètre.

En première lecture, on constate que la téléconsultation a touché plus de Français : dans la 1ère édition du baromètre de novembre 2018, 8 % déclaraient avoir téléconsulté au moins une fois au cours de l’année passée. Ils sont désormais 12 %, comme le révèle la 2e édition du baromètre. Une petite hausse en effet, mais à relativiser. Pourquoi ?

Parce que la téléconsultation est considérée, notamment par les autorités de santé, comme une voie nouvelle pour faciliter l’accès des citoyens aux soins sur l’ensemble du territoire et notamment là où les professionnels de santé sont peu nombreux… Or en analysant d’un peu plus près les chiffres, on s’aperçoit que ce sont surtout les grandes agglomérations (plus de 100 000 habitants) qui captent 52 % des téléconsultations, soit la moitié… Et même 27 % pour la seule région parisienne alors que les zones rurales ne représentent que 16 % des téléconsultations et que 25 % des Français y vivent. Les régions de déserts médicaux sont aussi celles des déserts numériques en santé. Nous sommes donc bien tentés de faire le lien.

Alors qui sont ces Français connectés et citadins qui téléconsultent ? Des « jeunes » patients de moins de 40 ans ! Bien qu’ils ne représentent que 35 % de la population, ils sont 48 % parmi les téléconsultants. Reflet d’une génération consumériste ou véritables besoins ? Alexis Bonis Charancle, Directeur associé de l’institut B3TSI, explique :

« Si on se penche sur les motifs liés à cet usage de la consultation à distance, on ne peut pas réellement parler d’un développement consumériste. Bien que jeune et urbaine, la population utilisant la téléconsultation a des motifs tout à fait légitimes ».

L’usage de la téléconsultation par une majorité d’urbains connectés ne reflète donc pas un quelconque comportement de paresseux et d’impatients qui ne voudraient pas se déplacer ni attendre, comme le souligne le Dr Alain Trébucq, président-directeur général de Global Média Santé, éditeur d’Egora :

« Cet usage urbain, correspondant à des délais de rendez-vous longs, montre combien il ne faut pas restreindre les notions de déserts médicaux, d’accès aux soins, aux seules zones rurales. Les évolutions démographiques et sociales, tant des professionnels de santé que de la population générale, impliquent de porter un regard neuf sur ce défi ».

Ainsi faudrait-il être plus prudent avec la notion de « désert médical ». La définition « géographique » qu’on lui prête volontiers de prime abord peut vite être mise à mal tant le terme de « désert » peut avoir plusieurs sens.